Le changement climatique n’est plus un horizon lointain. Ses impacts sont d’ores et déjà visibles, et leurs conséquences bien réelles pour les entreprises françaises. Tensions sur les ressources, hausse des prix de l’énergie, nouvelles exigences réglementaires… Face à cette réalité, les entreprises doivent désormais intégrer les risques climatiques au cœur de leur stratégie pour garantir leur pérennité dans un environnement en mutation rapide.
Comprendre les risques climat, c’est évaluer comment les phénomènes météorologiques, les évolutions réglementaires ou encore les mutations de marché, peuvent affecter directement ou indirectement l’activité d’une entreprise.
L’objectif est double : renforcer la résilience des modèles économiques face aux aléas climatiques, tout en répondant aux exigences croissantes de reporting extra-financier, imposées par les réglementations européennes (CSRD, CS3D, SFDR…).
Les deux grandes familles de risques climatiques pour les entreprises
On peut séparer les risques climatiques en deux grandes catégories : les risques physiques et les risques de transition. Ces deux dimensions traduisent des réalités différentes mais complémentaires du changement climatique, et de ses effets sur les entreprises.
D’un côté, les risques physiques regroupent l’ensemble des dommages directement liés aux dérèglements climatiques, et ne pouvant être évités :
- Catastrophes naturelles (inondations, sécheresses, feux de forêt, submersions marines…) ;
- Raréfaction de certaines ressources (eau, matière premières…) ;
- Hausse des températures et vagues de chaleur ;
- Etc.
Leurs conséquences se traduisent souvent par une baisse de productivité (- 50 % dès 33 - 34°C), la perturbation des chaînes logistiques ou des difficultés d’accès aux matières premières, compromettant ainsi la continuité opérationnelle.

Les risques de transition, quant à eux, sont des risques indirects, liés à la transformation vers une économie bas-carbone :
- Évolutions réglementaires (CSRD, BEGES, décret tertiaire, taxe carbone…) ;
- Risques financiers liés aux investissements nécessaires pour devenir une entreprise plus durable (rénovations, achat de nouveaux équipements, R&D…) ;
- Risques financiers liés à l’évolution de certains marchés (volatilité des prix de l’énergie…) ;
- Nouvelles attentes des investisseurs en termes de durabilité ;
- Changements dans les comportements des consommateurs ;
- Etc.
Pour les entreprises, les risques de transition peuvent entraîner une dévalorisation des actifs, une obsolescence de certains produits ou services, ou encore l’émergence de coûts additionnels liés à la fiscalité carbone.
🔎 Focus : au-delà des risques physiques et de transition, les entreprises sont de plus en plus exposées à des risques réputationnels. Une mauvaise gestion des enjeux climatiques peut nuire à leur attractivité auprès des investisseurs, des talents et des consommateurs.
Les risques climat sont à prendre en compte sur toute la chaîne de valeur
Il faut avoir en tête que les effets du dérèglement climatique sont nombreux et peuvent impacter l’ensemble de votre chaîne de valeur : depuis l’approvisionnement des matières premières jusqu’à la distribution des produits finis.
Le tableau ci-après présente des exemples concrets de risques liés au changement climatique, ainsi que leur impact sur différents maillons de la chaîne de valeur.
ℹ️ 1 milliard de dollars : c’est le coût des pertes annoncé par Toyota suite aux inondations en Afrique du Sud en avril 2022 (destruction de 4 300 véhicules et plusieurs mois d’arrêt de travail entraînant une perte de production de 45 000 voitures).
Comment estimer les risques climatiques pesant sur une entreprise ?
L’identification des risques climat passe par une approche méthodique, couvrant l’ensemble de la chaîne de valeur, à savoir :
- Cartographie amont et aval : recensez tous vos fournisseurs, partenaires, acteurs du transport, distributeurs, partenaires… pour obtenir une cartographie de vos chaînes d’approvisionnement et de distribution. L’objectif : identifier les risques physiques et de transition auxquels sont exposés les acteurs, et pouvant générer in fine un impact sur votre activité.
- Modélisation des risques : utilisez des modèles numériques (cat models, Climate Value-at-Risk, PACTA…), pour évaluer de quelle manière les variables économiques, politiques et environnementales influencent votre exposition face aux risques définis à l’étape 1 ;
- Hiérarchisation des risques : classez les risques en fonction de leur probabilité et de leur impact afin de prioriser les mesures d’adaptation et de décarbonation de votre chaîne de valeur.
Une fois les risques identifiés, il devient beaucoup plus simple de définir une stratégie d’adaptation pour amoindrir ces impacts.
Quel lien avec la CSDDD ?
La CSDDD ou CS3D (Corporate Sustainability Due Diligence Directive) est une réglementation européenne qui impose à certaines entreprises de mettre en œuvre un devoir de vigilance élargi à l’ensemble de leur chaîne de valeur.
Ces entreprises devront donc anticiper et prévenir les risques en matière d’environnement, de droits humains et de gouvernance, en lien avec leurs opérations et celles de leurs filiales, sous-traitants et fournisseurs.
Or, les risques climatiques font pleinement partie des risques environnementaux à évaluer. Les entreprises concernées devront donc estimer précisément ces risques, et mettre en place des mesures d’atténuation et de prévention.
Comment passer de la gestion du risque à une véritable stratégie de résilience ?
Vous l’aurez compris, l’anticipation est la condition centrale d’une bonne stratégie d'adaptation au changement climatique.
Les entreprises doivent désormais transformer leur approche du risque en une stratégie globale de résilience. Autrement dit, cela revient à intégrer pleinement les risques climat dans votre gouvernance et les décisions de l’entreprise au quotidien.
Pour y parvenir, la meilleure manière de procéder est de suivre le cadre réglementaire fourni par la directive CSRD, et plus particulièrement par la norme ESRS E1, dédiée au changement climatique. Cette dernière fixe les concepts fondamentaux du reporting de durabilité dans ce domaine. Elle fournit un cadre aux entreprises pour évaluer :
- Les risques physiques et de transition liés à leurs activités et celles de leur chaîne de valeur ;
- Les opportunités pour elles, associées à la transition vers une économie bas-carbone (innovation, nouveaux marchés, efficacité énergétique) ;
- Les actions (plan de transition) à mettre en place pour atténuer ces risques et réduire leur impact environnemental.
Ce fameux plan de transition est l’outil central de cette méthodologie. Il repose sur une évaluation rigoureuse des risques et opportunités pour votre entreprise. C’est un outil vivant qui vous aide à vous projeter sur différents scénarios climatiques, avec une visibilité sur les conséquences pour votre activité.
Conclusion
Demain, les entreprises qui tireront leur épingle du jeu sont celles qui auront défini une trajectoire permettant de prendre en compte les aléas climatiques. Ce sont elles qui resteront compétitives face à des marchés en transition et des réglementations toujours plus exigeantes.
Crédit photo : Nicolas Houdayer
